Cela faisait très longtemps que je n’avais pas écrit un article dans le blog Fibromelle. Je pense que la dernière fois que j’ai utilisé ma plume pour parler de mon expérience « fibrome » remonte à quelques années avant mon intervention chirurgicale qui a eu lieu en décembre 2018 au CHUM en plein hiver.

Avec mes responsabilités de présidente et mon poste d’infirmière aux urgences, j’ai dû mettre de côté mes histoires personnelles au profit de la fondation Vivre 100 fibromes à laquelle je consacre toute mon énergie bénévolement, comme un travail à temps plein, avec son lot d’heures supplémentaires non payées, qu’elles soient de jour, de soir ou durant le weekend.

Beaucoup de choses se sont passées depuis la création du blog jusqu’à aujourd’hui : des collaborations interprofessionnelles se sont créées, des activités d’information ont vu le jour, de jeunes bénévoles ont donné un nouveau visage à l’organisme (merci bénévoles en affaire), une clinique de fibrome a été mise sur pied pour permettre à des femmes de consulter un gynécologue spécialisé plus rapidement et, surtout, de très belles relations humaines se sont développées autour de ce formidable projet de vie.

De plus, Vivre 100 fibromes est devenu une fondation depuis janvier 2020. Cela permet une belle reconnaissance par le gouvernement canadien dans la promotion de la santé des femmes atteintes de fibrome utérin, au niveau national, afin de nous aider dans notre mission, car être reconnu comme tel permet à l’organisme d’émettre des reçus d’impôts à des donateurs à travers un numéro de charité.

Pourquoi je décide maintenant d’écrire ces quelques lignes ? Parce que je sens que je trouve enfin du temps pour me détacher des contraintes administratives pour parler de ce que j’aime réellement faire en aidant les femmes à travers mon expérience et mes connaissances acquises au fil du temps.

Retour en arrière, juste après m’être fait opérer de mes 17 fibromes utérins, je pensais qu’avec leur retrait que tout allait se remettre en place physiquement et mentalement… Et bien non, même si l’intervention s’est très bien passée, je garderai cela dans ma tête comme une forme de traumatisme durant toute ma vie, tant que nous n’aurons pas trouvé la véritable cause de ce problème qui touche de nombreuses femmes et parce que ma cicatrice en bas de mon ventre, que je regarde tous les jours, sera toujours présente pour me rappeler cet épisode de ma vie.

Au lieu de fermer définitivement la page du chapitre « je vis enfin sans fibrome », j’ai décidé de poursuivre l’écriture de cette histoire en continuant davantage à travailler sur la fondation : cela m’aura donné encore plus d’énergie pour me battre et pour faire avancer cette cause pour les femmes qui en sont atteintes. J’aurais pu jeter l’éponge depuis bien longtemps pour me concentrer sur un autre projet de vie, après tout, j’avais atteint mon objectif, mais je savais pertinemment que cette cause allait devenir ma mission de vie, cette cause m’avait choisie et il fallait que je m’y fasse bon gré mal gré. Cette opération…je prendrai le temps de raconter en détail la chirurgie dans les moindres détails dans un autre chapitre.

Avec le temps, j’ai appris que ma santé ne dépendait pas uniquement de fibrome utérin mais d’un ensemble d’éléments physiologiques pour me maintenir en forme afin d’éviter d’autres problèmes de santé et d’apprendre sans cesse sur moi en améliorant mon hygiène de vie, en trouvant un équilibre. Le mot prévention fait partie de mon quotidien désormais : prévenir avant de guérir; prévenir avant de soigner; prévenir avant d’opérer.

Je pense que mon corps ne me permettra plus de le négliger encore une fois comme je l’ai fait dans le passé. Je fais partie de ceux et celles qui n’ont plus le droit à l’erreur avec toutes les connaissances que j’ai intégrées durant les dernières années.  Mais même après mon opération, je me reposais sur mes acquis, je pensais que j’avais fait le plus gros du travail, mais cela était une erreur, je me cherchais toujours des excuses pour ne pas faire de changement concernant mon hygiène de vie. « Je travaille trop, mon ventre post chirurgie est dû à mes fibromes, je suis trop épuisée pour faire du sport, etc. »

Malgré mes petits changements alimentaires et sportifs, j’adoptais la loi du strict minimum, mais il fallait aller plus loin dans le no pain, no gain. Il fallait enfin que je me batte pour ce que j’avais de plus précieux au monde : MOI. C’est ainsi que j’ai réalisé mon premier 15 kilomètres en avril de cette année parce que j’avais décidé de ne plus trottiner mais de véritablement courir pour préserver ma santé. Ce fut l’élément déclencheur pour aller de l’avant et pour travailler sur une meilleure version de moi-même sur plusieurs plans : physique, psychologique, social et spirituel, et ce, en repoussant sans cesse mes limites.

Je commence aujourd’hui à récolter les fruits de mon travail sur mon corps, mais surtout sur mon mental, car à travers les petites actions que j’ai mises en place pour avancer, je sens que j’ai enfin un contrôle sur ma santé et, surtout, sur ma vie dans sa globalité.

Cela prend beaucoup de temps et de courage avant de décider de passer concrètement à l’action afin de changer ses habitudes de vie pour un problème de santé autant banalisé dont on ne connait pas réellement les causes. Certes, il y a des choses que nous ne pouvons modifier telles que notre couleur de peau, notre âge ou notre génétique, mais nous pouvons contrôler certains facteurs comme notre prise en charge à travers l’information et l’éducation. Par exemple, s’informer, c’est connaître les perturbateurs endocriniens pour mieux les éliminer ; s’éduquer, c’est apprendre sur la saine alimentation pour optimiser sa santé.

Le fibrome utérin n’est pas une fatalité lorsque nous décidons d’aller de l’avant et de prendre les choses en main quelle que soit la situation dans laquelle nous nous trouvons. Parfois, je me dis que ces fibromes étaient peut-être la meilleure des choses que j’ai eues malgré toute la souffrance que j’ai pu vivre à travers des symptômes très handicapants durant de nombreuses années. Je vois cela désormais comme une bénédiction pour mieux prendre soin de moi.

J’apprends maintenant les joies d’avoir un cycle menstruel régulier, sans douleur, sans prise de médicament, sans bouillotte chaude : une réalité que je voudrais crier haut et fort tellement cela tient du miracle d’un point vu personnel. J’apprends également les joies de suivre mon calendrier cyclique à travers la méthode symptothermique, les joies de sentir mes abdominaux en contractant mon ventre, d’apprécier mon nouveau moi dans le miroir en observant une silhouette se dessiner à nouveau, les joies de manger sainement en ne voyant plus de privation, mais des bénédictions en buvant tout simplement, à mon réveil, de l’eau citronnée accompagnée de compléments vitaminés. Qui aurait cru que ma période de règle allait devenir un moment de repos et de qualité pour prendre soin de moi en étant à l’écoute de mon corps ?

Je souhaite le bonheur que je ressens actuellement à toutes ces fibromelles qui sont en difficulté sur le plan physique à l’approche de leurs menstruations, qui attendent de régler leur problème de fertilité ou qui veulent, tout simplement, retrouver la forme et l’énergie comme auparavant.

Je remercie Dieu, car je me sens également très bien entourée à travers le soutien des fibromelles qui ont également connu les mêmes défis que les miens : je peux parler facilement d’activité physique avec une membre, d’alimentation avec une autre ou de fertilité, menstruation, méditation, gestion du stress, sexe, estime de soi ou d’autres problèmes dont nous n’oserions pas parler à tout le monde, même pas à notre mère !

J’ai pu m’entourer, à chaque étape de la création de l’organisme, de personnes qui avaient la même envie que moi de faire quelque chose pour la cause, si ce n’est que pour donner une identité à Vivre 100 fibromes, un sens, une équipe et une vision. Je le dis toujours, cela tient du miracle de continuer à exister sans la présence de financement, mais il faut bien avancer, car je sais pertinemment que nous sommes sur la bonne voie. Nous pouvons aider concrètement à faire de cette maladie un enjeu de santé publique sur un plan national comme international et définir un modèle de santé à travers une approche holistique concernant le fibrome utérin en apportant des solutions concrètes aux femmes.

Merci Vivre 100 fibromes pour tout ce que tu m’apportes dans ma vie au quotidien et dans celles des autres femmes que nous avons pu déjà aidées par un conseil, une écoute, un soutien, une référence malgré les obstacles et les défis. Je reste convaincue que les choses se feront d’elles-mêmes avec l’aide de Dieu, des membres, des donateurs, des organismes et des professionnels.

Es-tu prête à te prendre en main ?

Fibromellement,
Aïssatou Sibidé.